• Une fois n'est pas coutume, je vais parler d'un livre écrit par une amie, et publié il y a déjà deux ans. Je l'ai acheté il y a quelques mois et je l'ai enfin lu. Il s'agit de L'histoire du garçon à la jambe de bois, de Morgane Deleval, paru chez Edilivre et disponible un peu partout il me semble.

    Voici la quatrième de couv': Ira fonctionne par verrouillage automatique, comme un vieux réflexe presque confortable. Link est un puzzle. Il sent qu’il y a certaines pièces qui coincent, mais lesquelles ?
    Leur rencontre va faire vaciller leurs certitudes. Des réponses à des questions qu’ils ne se posaient pas encore. Des vides insoupçonnés, comblés l’un par l’autre.
    Ces deux garçons avancent sur un fil, comme des acrobates amusés et enivrés de leurs vertiges. Ils ignorent encore à quel point la corde est solide.
    Aimer est le plus beau des risques.  

    Autant écrire des trucs de romances grandiloquentes et barrées me fait marrer sur un forum RPG, autant en lire, de la romance, ce n'est pas forcément ma tasse de thé. Je suis pas la fille la plus romantique du monde (mon mec est plus romantique que moi!) mais quand c'est bien amené et que les personnages sont attachants, pourquoi pas!

    C'est là la force de ce court (102 pages) roman. On va droit au but en zappant les détails annexes pour se concentrer sur Ira et Link, deux âmes blessées, chacune à leur manière. Deux caractères différents, deux façons de vivre différentes. Je me suis identifiée aussi bien à Ira (qui me fait quand même l'effet d'être un connard XD) qu'à Link, pour leur fonctionnement et ressentis, justement. L'un fonctionne par verrouillage automatique, l'autre est très effacé et décalé. Et ce sont des caractéristiques crédibles, réalistes, et je sais de quoi je parle^^. Même si ma vie ne ressemble en rien à celle des deux protagonistes, ils sont assez réels pour qu'on les suive, s'attache à eux.

    Deuxième point fort, le découpage. Leur histoire, leurs problèmes, ne se résolvent pas comme par magie en trois coups de cuiller à pot, au contraire. Cela prend du temps, des mois, une année (temps du roman) et la fin n'est pas la fin, justement. Mais on suit ces deux garçons, mois après mois, dans cette année charnière durant laquelle leurs convictions vont tomber et ils vont devoir affronter leurs peurs et leur démons pour s'en sortir grandis.

    J'ai quelques petits bémols à accorder, mais qui n'entâchent pas vraiment ni la lecture, ni l'histoire dans sa globalité. Si on connaît le background d'Ira, sa famille, ses relations avec elle, on ignore presque tout de Link, à part qu'il a une meilleure amie. J'aurais aimé en savoir plus sur lui. En même temps, c'est cette part de mystère, de garçon qui ne se dévoile pas, qui fait aussi son charme. Il est effacé, dans tous les sens du terme, et prend de plus en plus d'importance, dans l'histoire comme dans sa manière d'intéragir avec les autres.

    Le livre est réellement du point de vue d'Ira et de Link. Et ça se ressent dans le quasi anonymat des autres personnages qui vont et viennent. Ira ignore volontairement les autres, Link est limite un figurant dans sa propre vie, donc dans celle des autres.

    En bref, une très bonne lecture, sur un ton très agréable à lire, avec des dialogues tantôt cinglants, tantôt ironiques, qu'on aimerait sortir plus souvent. Des paroles actuelles, qu'on dirait nous mêmes, qu'on entendrait facilement. Bref, pas du surjoué, ni du jeunisme raté (Mais si! c'est 'bleu-ssi-po! si vous vous souvenez de la pub SNCF xd).


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  • Bonjour bonjour (ou bonsoir!). Pour ce billet, je vais parler à la fois d'un livre et d'un film. Il s'agit du roman de Lois Lowry paru en 1993, Le passeur (The Giver en VO) et du film du même nom, réalisé par Philip Noyce, avec Brenton Thwaites et Jeff Bridges (entre autres) et sorti  en 2014.

    ATTENTION, IL Y A DU SPOIL ICI, MÊME SI JE NE DIS PAS LA FIN.

    Passeur / Giver                 Passeur / Giver

    J'ai d'abord vu le film et ce que j'ai vu m'a assez intriguée et plu pour que je lise le livre. Le roman a la réputation d'être parmi les premiers livres de dystopie pour ados, sinon le premier. Il se déroule dans un avenir qu'on devine à plusieurs générations de nous (au moins sept ou huit, je dirais), puisque cela fait très longtemps que la société décrite est telle qu'elle est et que plusieurs Passeurs se sont succédés, après ce qu'on a appelé la Ruine (la destruction du monde tel que nous le connaissons.)

    Dans cet avenir, les hommes vivent dans des communautés où il n'y a que des émotions de surface (contentement, amitié simple, satisfaction, amusement) mais rien de profond (pas de haine, pas d'amour, pas de jalousie, etc.). Chacun a un rôle bien défini et suit des règles simples. L'enfance y est très balisée, et à chaque étape, il y a une cérémonie. Dès huit ans, ils font du bénévolat, ce qui aidera les anciens à déterminer leurs atouts et intérêts pour leur donner leur futur rôle dans cette société si parfaite, lisse, conformiste au possible. Cette attribution est donnée lors de la cérémonie des 12 ans, qui marque la fin de l'enfance et le début de la formation à la vie d'adulte.

    L'histoire commence en hiver. Jonas a 11 ans et appréhende sa cérémonie. Lors de cette dernière, on ne lui attribue aucun rôle lors de la répartition. On le retient à la fin pour révéler au peuple qu'il a été sélectionné pour devenir le prochain Dépositaire de la Mémoire. Il suivra donc sa formation avec l'actuel historien/musée à mémoire de service, qui lui passe les souvenirs. Le passeur, c'est lui. Et Jonas apprend ce qu'était le monde avant la Ruine. Il apprend les sentiments, les couleurs, les relations humaines, le bon, le mal, la paix, la guerre... Est-ce bon de savoir tout ça? Ou est-ce meilleur de conserver la communauté telle qu'elle est?

    Le film suit la trame générale, jusqu'à la fin, qui est à peu près pareille. En cela, dans le propos et les faits, les deux oeuvres sont assez similaires. Il y a tout de même des différences, des aspects, ou des caractéristiques des personnages qui sont passés à la moulinette de l'adaptation.

    Tout d'abord, l'âge de Jonas et de ses amis. Il ont désormais 16 ans. Et je dois dire que c'est pour le mieux. Mon avis est qu'un gamin de 12 ans me paraît moins apte à vivre et accomplir ce qu'il fait dans le livre. Un adolescent rend l'histoire un peu plus crédible à mes yeux. Après, le choix d'en faire des ados était probablement influencé par le Dieu Argent et l'effet de beaux jeunes gens sur le public cible (un peu comme pour Percy Jackson, qui a subi la même croissance pour son passage sur grand écran).

    Ensuite, les médicaments. Dans le roman, il est dit que tout le monde, dès les premiers signes de désir (sexuel), prend une pillule pour anesthésier ces effets. Dans le film, ce n'est pas précisé, et le médicament que les gens prennent semble être un fourre-tout imprécis. Ce n'est pas bien grave, mais ça aide à la compréhension de ce monde.

    Pour continuer, Asher, le meilleur ami de Jonas et Fiona, devient pilote de drône car aventureux, hors dans le livre, il est plutôt maladroit et rigolo, ce qui fait de lui un futur responsable des loisirs. Ce changement n'a qu'un seul but selon moi: aider le scénario à avancer en y ajoutant une dose de tension et d'action. De quelqu'un assez accesoire (dans le roman), il devient un peu plus important voire essentiel pour le déroulement de l'histoire (dans le film.)

    Il y a d'autres différences, mais elles sont moindres, dirais-je. Le propos du roman reste inchangé: la liberté, le libre-arbitre, les émotions, la mémoire, la différence, l'individualité sont des parties intégrantes de l'humanité et les retirer fait de nous des pâles fac-similés, dans un état finalement totalitaire et délateur.

    Le livre se lit très rapidement. J'ai été pour ma part un peu sur ma faim à la fin, mais finalement ça reste ouvert. Peut-être faut-il lire les autres livres pour comprendre ces communautés et les conséquences des actes de Jonas. En tout cas, on comprend les enjeux et on découvre petit à petit, même si on s'en doutait vachement avant, quelles horreurs les gens de cette communauté commettent sans en avoir vraiment conscience, pour certains (la scène avec le nourricier et le bébé, aussi bien dans le roman que dans le film, fait froid dans le dos. C'est ça, leur perfection?)

    Le film se suit très bien. Tout est en niveaux de gris, pour coller à l'atmosphère du roman, dans lequel on ne voit pas les couleurs. Et les couleurs apparaissent ici et là, au fur et à mesure que Jonas avance dans son apprentissage de la mémoire. J'ai trouvé l'acteur principal (Brenton Thwaites) convainquant, à la foix doux, hésitant, mais finalement déterminé. Les adultes font leur boulôt, les autres ados aussi. Tout se tient bien. Il y a bien quelques failles, notamment dans le montage, qui rend le tout maladroit. Par exemple, lors de la cérémonie, les ados défilent, on leur donne leur attributions, mais pour Asher et Fiona, on a droit à un speech qui résume les raisons de ces attributions. Cela rend le tout bancal. Il n'y a rien de ça dans le roman.

    Il aurait aussi fallu apporter plus de nuances dans la différence entre les émotions de surface et les sentiments profonds. Quoi qu'il en soit, même un peu bancal, cela reste pour moi un beau film sur la recherche de soi, de la différence, de la mémoire, au même titre que le livre.

    Livre: 7/10 - Film: 7/10


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